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Notre position face à la psychanalyse

Le 22 octobre 2019, à l’initiative de la réalisatrice Sophie Robert, une tribune intitulée « La psychanalyse ou l’exercice illégal de la médecine » a été publiée sur le Nouvel Obs. Signée initialement par une soixantaine de professionnels de la santé, psychiatres ou psychologues, cette publication recense ce jour plus de 1000 signataires professionnels. Le but de cette tribune est de dénoncer l’omniprésence de la psychanalyse dans les milieux médicaux, sociaux et juridiques, alors même que les théories et pratiques psychanalytiques ne sont pas fondées sur des données et preuves scientifiques.

Les répercussions en France en 2019 sur la prise en charge de la psychiatrie en général, et de l’autisme en particulier, sont considérables, et font de notre pays un des plus en retard dans l’application des recommandations internationales de bonnes pratiques (en tout cas dans les pays dits industrialisés).

Madame Martine Wonner, médecin psychiatre, a signé la Tribune, motivée semble-t-il par la volonté d’une meilleure prise en charge des patients, et d’une amélioration des pratiques professionnelles en accord avec l’évolution internationale.

Dans un pays démocratique, il paraît essentiel de pouvoir exprimer ses valeurs, ses opinions librement. Pourtant, des psychanalystes se sont saisis du fait que le Dr Wonner soit une élue locale, Députée, pour dénoncer son engagement auprès du Président de son groupe parlementaire, et se positionner en victimes « de désinformation outrageante et fallacieuse de la pétition ». Chacun pourra apprécier la méthode délationniste utilisée au détriment d’une discussion de fond sur les pratiques professionnelles. Si les psychanalystes n’ont rien d’autre pour défendre leurs thèses que de chercher l’explication des critiques dont ils font l’objet dans une volonté politicienne liberticide, et sans s’interroger sur leur propre fonctionnement, alors c’est inquiétant.

De tels moyens d’intimidation nous sont inacceptables. Ils s’ajoutent à une absence de remise en question ou d’apport de preuve de résultats concrets des pratiques psychanalytiques. Les membres du collectif GRAAF apportent leur soutien au Dr Martine Wonner qui semble partager la même volonté : celle de se servir des avancées scientifiques au bénéfice des patients.

Le débat sur la place de la psychanalyse dans les institutions françaises doit être ouvert, libre et accepté comme étant un véritable problème de santé publique.

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Petit rappel sur ce qu’est la psychanalyse

C’est la pratique d’un discours entre l’analysant et l’analyste, en vertu d’un transfert : l’analysant associe verbalement et librement ses pensées, encouragé par le psychanalyste (notamment par l’usage répété de l’onomatopée « mmh » et/ou par des modulations de la voix). Le psychanalyste écoute l’analysant en s’efforçant de maintenir une attention flottante couplée à une neutralité bienveillante, avant d’interpréter ses mots ou ses absences de mots, ses silences. Interprétation qu’il délivrera en partie à l’analysant pour rendre conscient ce qui était refoulé (de l’ordre des pulsions sexuelles) et ainsi supprimer le symptôme. Interprétation par définition subjectiviste, qui sera guidée par des mises en relation aléatoires avec le passé du patient, par le jeu des symboles ou encore par la technique du « mot-pont » consistant à décortiquer des mots pour en faire des jeux (de mots). Le cadre dominant du psychanalyste est important : c’est lui qui choisit la durée, la fréquence, les horaires et le prix des séances (et le mode de paiement en espèces. Nous saluons ici le travail des services fiscaux !).

Si la psychanalyse se limitait à des adultes consentants, informés et sans trouble mental majeur, il n’y aurait rien de grave. La liberté de pensée est en effet aussi dans la liberté de prise en charge.

Or, à l’heure actuelle, en France, aucune étude scientifique n’a été, à notre connaissance, réalisée pour évaluer les effets des cures psychanalytiques.

Or, le titre de psychanalyste s’acquiert par le fait d’avoir suivi une analyse et non par des études finalisées par un diplôme ; la majorité des psychanalystes étant psychologue ou psychiatre de formation mais pas obligatoirement. Aucun contrôle des pratiques n’est effectué en cours de carrière par un ordre professionnel et assermenté.

Or, les théories psychanalytiques attribuent aux enfants des désirs sexuels, aux mères un rôle pathogène. Dans les cours de psychologie clinique d’approche psychanalytique, le complexe d’œdipe, les théories sexuelles infantiles, entre autres concepts qui n’ont pas de validité scientifique, sont présentés aux étudiants comme des éléments fondamentaux de la construction psychique des individus.

Or, les théories et pratiques psychanalytiques sont omniprésentes dans les domaines médicaux, sociaux, juridiques, universitaires, au détriment des autres approches théoriques ou thérapeutiques susceptibles d’être mieux adaptées (et prouvées comme mieux adaptées dans les pays où elles sont développées).

Enquête

Pour exemple du décalage des pratiques psychanalytiques avec les besoins en termes de suivi et de soin, nous proposons les résultats d’une enquête initiée en mars 2019 par un groupe de parents, portant sur le suivi en centre/établissement sanitaires et médico-sociaux (CMP, CMPP, CAMPS, Hôpitaux de jour). Les objectifs de cette enquête étaient de dresser un état des lieux de la prise en charge (évaluation diagnostique et interventions) des personnes autistes dans ces lieux, au regard des recommandations de la HAS et de recueillir la parole et le ressenti des usagers.

Le bilan de l’enquête est probant quant au fossé véritable entre les recommandations de la HAS, les engagements de la stratégie Autisme et les pratiques de terrain de ces établissements qui perçoivent de l’argent public sans contrôle des dispositifs mis en place : seulement 1⁄4 des personnes sont satisfaites du suivi, 70% des personnes (sans diagnostic à l’entrée dans ces structures) n’ont pas d’évaluation diagnostique, 64,3% des familles sont en désaccord avec le suivi (culpabilisation ou dévalorisation du rôle parental étant les principales causes du désaccord).

Conclusion

Nous sommes en 2019, en France. Il est globalement admis que la Terre est ronde. Les avancées technologiques permettent aux chercheurs d’étudier le cerveau et d’identifier les zones activées selon les tâches en cours. Pourtant la psychanalyse est encore omniprésente. Les techniques du packing ou de la pataugeoire sont encore utilisées.

La psychanalyse est la principale référence psychothérapeutique relayée par les médias français, empêchant le grand public d’appréhender la psychologie ou la psychiatrie autrement que par des concepts freudiens ou lacaniens. Ainsi, quand un dessinateur met en scène une situation thérapeutique, il va dessiner un patient allongé dans un divan et un thérapeute assis derrière. Mais, il faut savoir qu’un accompagnement thérapeutique peut être dynamique, sortir de la passivité et du ressassement, pour proposer des solutions concrètes et inscrites dans un délai à court ou moyen terme.

Nous ne demandons pas l’élimination de la psychanalyse, mais qu’elle retrouve une place adaptée à un choix de parcours thérapeutique personnel, qu’elle ne soit pas présentée et imposée comme unique méthode. Nous demandons que les personnes en besoin d’accompagnement psychologique, de prise en charge psychiatrique et médicale puissent bénéficier d’autres approches thérapeutiques, validées scientifiquement.

En 1977, Lacan lui-même, dans un éclair de lucidité lors de la Conférence de Bruxelles, n’avait-il pas fini par avouer « notre pratique est une escroquerie… d’un point de vue éthique, c’est intenable, notre profession » ?

C’était il y a 42 ans…il est temps de changer le divan.

© Magali Pignard et Maryline Chenavier pour le GRAAF

Liens utiles

Blog de l’enquête : AUTISME ET SUIVI EN CMP…

Article du Nouvel Obs en date du 22/10/2019 :
POURQUOI LES PSYCHANALYSTES DOIVENT ÊTRE EXCLUS DES TRIBUNAUX

Tribune de Sophie Robert :
LA PSYCHANALYSE OU L’EXERCICE ILLÉGAL DE LA MÉDECINE

Dénonciation de Mme la Députée et Dr Martine Wonner :
MME WONNER DÉPUTÉE ET LA PÉTITION EXIGEANT L’INTERDICTION DE LA PSYCHANALYSE…

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